bonheur en tranches

Et si le bonheur des uns faisait aussi le bonheur des autres…

Respirer les vacances.

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On me félicite de l’exemple que je te donne. Il paraît que je te montre combien une femme peut être à la fois accomplie dans sa vie professionnelle et dans ses relations amoureuse, familiales, amicales, alouette.

Mais il faut que tu saches que, d’abord, je n’ai pas fait exprès, et qu’ensuite, je ne veux absolument pas être une « Wonder Women » !

Je n’ai qu’une tête et 2 mains, chacune de mes journées n’a que 24h et si je ne dors pas mes 9h ininterrompues, j’ai du mal à fonctionner. Paraît que je ne suis pas la seule. C’est comme ça depuis très longtemps. Il doit bien y avoir une bonne raison ! Et pour tout te dire… Je m’en contente plutôt bien. Moi, mon rythme naturel, il me va bien.

C’est les autres qui ne s’en contentent pas.
Ils veulent que je fasse plus, plus vite, avec moins.
On s’attend à ce que les parents soient présents pour leurs petites larves, leur donnent le sein à la demande, dorment avec eux, les surveillent, les stimulent, les éduquent sans hausser le temps ni lever la main, calment leurs angoisses. Que les mamans ne fassent pas d’impasses sur la gym dès la 6ème semaine après l’accouchement – Gogogo ! On se remet en forme ! Que la maison soit spic’n’span en tout temps, les jouets rangés, le recyclage, le composte, et les ordures dans leurs boîtes respectives et mis sur le bord de la route au bon moment. Que les parents fassent eux-mêmes un potager (plantent les semis, arrosent les semis, transplantent les semis, arrosent de nouveau, surveillent, désherbent à la main, récoltent, mitonnent, etc.) ou au moins, à ce qu’ils prennent le temps de faire les courses en privilégiant les produits locaux, bio, zen, sans sucres ajoutés et surtout qu’ils préparent des plats santé, limitent le gaspillage alimentaire et l’empreinte écologique du ménage. À ce que les conjoints se guident mutuellement dans leur apprentissage de la paternité, de la maternité. Et à ce qu’ils se réservent des moments pour établir de sains mécanismes de communication, pour échanger, pour entretenir la flamme. Qu’ils suivent les formations, les ateliers, ne forcent plus les enfants à manger pour qu’ils gardent leurs signaux de faim et de satiété impacts, ne disent plus ceci ou cela, prennent le temps d’écouter, subviennent à tous leurs besoins, vitaux ou non. Qu’ils fassent le ménage et l’entretien de la maison seuls – surtout ne pas encourager la main d’œuvre bon marché et illégale. Qu’ils fassent la lessive et le ménage avec des produits sans phtalates s’ils n’ont pas le temps de les faire maison avec du bicarbonate de soude, du jus de citron, et du vinaigre. Pas très long, mais enfin, certains disent ne pas avoir le temps quand même (soupirs !)
Mais aussi à ce qu’ils travaillent tous les 2 quand même 40 h par semaine à l’extérieur de la maison, pour illustrer qu’ils sont utiles à la société, qu’ils ne sont pas des charges pour les honnêtes citoyens. Et qu’ils se rendent au travail en transport en commun (voir empreinte écologique !) même si ça rajoute 15h de transport par semaine.
Et à ce qu’ils s’occupent de leurs parents vieillissants pour qu’ils puissent mourir à la maison – le seul endroit où ils trouveront un peu de sécurité et de dignité – et surtout parce qu’il faut alléger le fardeau économique qui pèse sur la santé publique « à cause » de la population vieillissante.
À ce qu’ils aient un bon réseau d’amis avec qui ils échangent sur une base régulière, à ce qu’ils regardent le téléjournal tout les soirs à 22h pour être de bons citoyens éclairés. À ce qu’ils redonnent au suivant et s’impliquent dans leur communauté.

Tu vois, rien que d’y penser, mon pouls s’accélère, mes chakras se referment comme une plante carnivore sur une mouche à m….

Moi, j’ai besoin de temps pour ne rien faire. Pour m’ennuyer. Pour trouver le temps long. Pour attendre qu’il passe. Pour regarder tomber les poussières dans les rayons de soleil. Pour faire un mandala. En entier. Pour lire un livre léger. Voir une exposition. Apprécier la beauté de la nature, des gens. Encourager un ami artiste. Aider une voisine. Écouter l’histoire de quelqu’un. Sourire. Profiter du soleil les 3 jours où il sort. Rêver !
Pour réfléchir aussi. Mais il paraît que si je regarde le 22h, je n’aurais plus besoin de réfléchir pour être une bonne citoyenne – on va m’expliquer ce que je dois penser, ça va aller tout seul.
Pour aimer, beaucoup.
C’est long de construire une famille. Il faut monter la confiance, déplier l’humour, bricoler un rythme qui convienne à tout le monde. Ça ne se fait pas comme ça. Il faut y mettre le temps.
Et moi, je trouve ça très satisfaisant de prendre ce temps là. D’avoir le temps de t’écouter me raconter pourquoi le dragon paraît si grand – c’est un effet de perspective Maman : en fait, il a l’air plus grand parce qu’il est plus près. La forêt elle est loin loin derrière, tu vois ? – Je trouve ça stimulant d’essayer de comprendre ce qui vous ferait plaisir à toi, à papa, de vous dire ce que j’imagine pour nous, de planifier ensemble les prochaines vacances, de bricoler des masques de squelettes dans de vieilles boîtes de kleenex… De faire le tour du bloc après le souper, ensemble, sans destination précise. De rêver mieux, ensemble.

Et puis je n’aime pas courir.

Alors ces vacances, avec toi, avec nous, je vais les boire jusqu’à la lie, les laisser fondre lentement tout contre mon palais, nous y baigner, nous y lover, les prolonger, et recommencer !

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